Le sujet a tendance à polariser les opinions et ainsi, la drag queen Rita Baga a décidé de lancer un message sur le sujet, dans une longue publication faite sur Facebook:
« J'ai beaucoup hésité avant d'écrire ceci.
D'abord, parce que prendre position me semblait inutile. J'avais l'impression d'avoir déjà répondu aux questions « actuelles » à notre propos. 100 fois depuis trois ans, sur toutes sortes de plateaux. Et surtout, parce que je ne fais pas d'heure du conte. Je ne voulais pas être imposteur.e, ni avoir l'impression de devoir répondre à tout prix à toutes ces demandes d'entrevues depuis quelques jours, au nom « des drags ». Nous ne sommes pas un bloc monolithique. Nos voix sont plurielles.
On voit beaucoup de drags à la télé et aux nouvelles, ces jours-ci. C'était un de mes plus grands souhaits, quand j'ai commencé à avoir la « lumière » du grand public et des médias. Démocratiser l'art de la drag, vous l'avez entendu quelques fois, celle-là. De toute évidence, il reste du travail à faire. Et plusieurs types de drags sont toujours dans l'ombre.
On écrit presque tous les jours un nouvel article sur nos communautés. Nous sommes devenu.es à un sujet de conversation récurrent. Une « polémique ». On nous colle des étiquettes, on prend des raccourcis pour pouvoir nous pointer du doigt. On pourrait se dire que c'est normal: on nous voit plus, il y a plus de gens qui nous aiment, donc il y en a plus qui nous déteste. Mais ça ne devrait pas être comme ça.
On peut préférer une chose à une autre, sans sentir le besoin de rabaisser ou détruire ce qu'on apprécie moins. Parce qu'au final, derrière nos personnages, nous sommes des êtres humains, à part entière.
Les communautés de la diversité sexuelle et de genre ont longtemps été les « punching bags » des problèmes de la société. Les marginaux, les minoritaires, c'est de leur faute. Et longtemps, la haine de ces communautés a servi de bouclier et de diversion pour tenter de trouver la source du problème.
La source: c'est l'incompréhension, la peur, face à ce qui est différent. Pour d'autres, un refoulement d'émotions qui se transforme en haine
Parce que des personnages comme nous, c'est ancré et accepté dans la culture québécoise populaire depuis des années.
J'ai 35 ans. J'ai grandi avec Moman dans La Petite Vie, Madame Jigger, Priscilla et les nombreux personnages drags de RBO, Benoit Brière et Marc Labrèche. C'était « hilarant », pour le grand public.
Mais nous, qui pratiquons le métier de façon professionnelle (et disons-le, mieux!), sommes de plus en plus confronté.es à des menaces, manifestations et autres formes de violence. La différence? Nous sommes, pour la plupart, queer. Ah, ça, ça ne passe pas!
Dimanche dernier, Mona de Grenoble a gagné Big Brother Célébrités. Quelques mois plus tôt, Gisele Lullaby a remporté Canada's Drag Race. Et depuis quelques années, je vis de belles choses, grâce à vous, grâce à Mado Lamotte et Guilda.
C'est aussi le cas de mon amie et collègue Barbada de Barbades qui sera demain à tout le monde en parle. Une carrière extraordinaire. Je vous invite à l'écouter. Derrière le personnage, vous trouverez un enseignant d'expérience, un pédagogue, un humain. Bref, quelqu'un qui ne mérite pas qu'on l'empêche de lire des contes sur l'acceptation, l'inclusion et la diversité.
Pour se faire une idée, c'est toujours mieux d'aller à la source.
Et après, espérons-le, on pourra se concentrer sur le positif et sur les nombreuses victoires et moments significatifs pour beaucoup, beaucoup de personnes. Parce qu'il y en a. Et il en reste! Le vivre et laisser vivre est loin d'être acquis.
J'ai vu et lu beaucoup d'articles et publications dans les deux dernières semaines. Peu provenaient directement de drags. Écoutez Barbada demain. C'est bien, les allié.es. On a besoin de vous. Mais être entendu.e et écouté.e, c'est mieux. »
Un texte qui porte définitivement à réfléchir.